Hiroshima

Ce malaise s’accroît lorsqu’il découvre une ville ordinaire, avec ses néons, ses gratte-ciel, ses magasins bondés et ses embouteillages. Avec plus d’un million d’habitants, Hiroshima est la dixième ville du Japon. Et elle pourrait n’être que ça. Mais, depuis 1945, Hiroshima est aussi, et surtout, la mauvaise conscience de l’humanité.

Le ciel est bleu et il fait chaud en ce matin d’été du 6 août 1945. Un homme, assis sur les marches de la banque Sumitomo, attend l’ouverture des portes. Il est 8 h 15. Quelques instants plus tard, il ne restera plus que son ombre sur ces blocs de granite blanchis par le grand éclair.

Hiroshima

Le B-29 Enola Gay vient de lâcher « Little boy », la première bombe atomique de l’histoire. La ville n’est plus que cendres fumantes. Cent cinquante mille personnes sont tuées sur le coup ou meurent dans les semaines suivantes. Au total, la bombe aurait fait deux cent mille morts et des dizaines de milliers de blessés ou des victimes des radiations. Seule tient encore debout la carcasse de ce qui abritait le centre de promotion industrielle. Tout un symbole.

Aujourd’hui, « le dôme atomique » est toujours là, tel un squelette au milieu de la verdure. Des immeubles modernes le dominent. En contrebas, au bord de la rivière, on peut louer des petites barques pour canoter sur les plans d’eau du parc mémorial de la Paix.

Hiroshima

Sur la pancarte du bureau de location, comme sur les dépliants touristiques, au milieu des pubs pour coca, s’affiche en grandes lettres cette phrase qui serait banale partout ailleurs mais pas ici, surtout au pied du dôme et écrite en anglais : « Welcome to Hiroshima ».

Indifférence ou étonnante capacité d’oubli des Japonais. Apparemment, ils n’éprouvent aucun ressentiment à l’encontre des Américains et tout se passe comme si le bombardement atomique relevait plus de fatalité, voire d’une catastrophe naturelle, que d’un acte de guerre ayant opposé deux ennemis.

Les vitrines du musée de la Paix témoignent pourtant de l’horreur : photos du nuage atomique et de la ville rasée, vêtements brûlés, métaux fondus et la marche d’escalier de la banque avec son ombre humaine. Mais les japonais ne se lamentent pas sur leurs malheurs passés.

Hiroshima

Hiroshima est fière de son essor économique, de ses industries, de ses nombreux parcs et cours d’eau et de sa baies ou sont cultivés les trois quarts de la production nationale d’huîtres. Situé près d’Hiroshima, sur l’île de Miyajima, le sanctuaire marin d’Istukushima est l’un des trois plus beaux décors du Japon.

Les différents bâtiments sont construits sur pilotis et reliés par des galeries. A marée haute, le sanctuaire donne l’impression de flotter sur la mer et son grand torii rouge, entouré d’eau, émerge des flots. Pour peu qu’il soit légèrement noyé dans la brume, le lieu saint se fond encore davantage avec la nature, dans une ambiance mystérieuse.